Philippe Maitre, DGS de la communauté d'agglomération de Paris Saclay
(Essonne – 27 communes - 315 000 habitants)
Quel est votre parcours professionnel ?
J'ai commencé ma carrière professionnelle en 1998 en tant que responsable RH puis DGA en charge des services à la population dans la commune de Chaville (Hauts-de-Seine - 20 000 habitants). En 2001, je suis parti pour mon premier poste de DGS à Orsay dans l'Essonne (16 500 habitants) et j'y suis resté 7 ans. À cette période, j'ai cumulé 2 emplois pendant 18 mois : le premier était DGS de la communauté de communes qui deviendra par la suite l'agglomération du Plateau de Saclay, le second était DGS du syndicat mixte des ordures ménagères de la vallée de Chevreuse (SIOM). Comme de nombreux collègues qui ont connu l'alternance politique, j'ai quitté mes fonctions en 2008 pour devenir DGS de la commune de Gif-sur-Yvette (22 000 habitants) pendant 7 ans en mettant l'accent sur mes compétences en matière d'urbanisme avec le développement d'éco-quartiers. En 2014, tout en gardant mes fonctions de direction de la ville de Gif-sur-Yvette, je suis revenu à l'intercommunalité pour prendre les fonctions de DGS du Plateau de Saclay. Ma première mission a été de mener la fusion et la réorganisation du Plateau de Saclay qui est devenu Paris Saclay en passant de 120 000 à 315 000 habitants (représentant l'union d'une agglomération de 170 000, d'une autre de 130 000 et de 2 communes) pour 27 communes depuis 1er janvier 2016.
Quel projet a particulièrement marqué votre carrière ?
Il y en a plusieurs bien sûr même si la fusion des 2 agglomérations m'a particulièrement marquée puisqu'on se retrouve dans une configuration où il y a une communauté qui absorbe et l'autre qui est absorbée... On a un peu l'impression d'être dans Koh Lanta !
Passé cet état de fait, il faut rapidement bâtir un pré-projet de territoire, voir les compétences à transférer, faire un état des lieux des finances, rédiger un diagnostic territorial et voir les enjeux qui nous rassemble.
Ainsi, nous avons élaboré toutes les étapes administratives et politiques pour créer la communauté d'agglomération au dernier semestre 2015. Ensuite, il a fallu aider les élus à se projeter, les amener vers une autre histoire tout en les rassurant. Dans le même temps, il ne fallait pas négliger les bonnes relations à entretenir avec l'État qui sont fondamentales.
Cette expérience m'a permis d'apprendre 3 notions nécessaires à la bonne conduite de l'exercice périlleux que représente une fusion : Anticiper – Prendre de la hauteur et Rassurer. Notions qu'on devrait nous apprendre à l'école… je précise également qu'un DEA de psychologie serait un plus !
Plus sérieusement, une fois que la gouvernance est actée c'est au tour de l'organisation administrative et c'est un véritable challenge entre les équipes – qui sera DG ? qui sera DGA ? – Pour ma part, mon président a choisi de continuer avec moi et j'ai dû apprendre à analyser très vite les enjeux car en interco on a le syndrome de la page blanche, les élus doivent se projeter sur un territoire qu'ils ne connaissent pas et c'est à nous de les embarquer. Tout est à écrire : on a tout à créer, il faut tout mettre en musique et animer le projet commun. On va chercher des ressources d'analyse, une vision avec un projet… on cherche également des postures territoriales qu'on ne connaît pas en commune ou dans une intercommunalité déjà bien intégrée. Il faut créer et raconter une histoire dans un climat souvent tendu et toujours rassurer les élus.
Quel est votre projet d'actualité ?
En fait, il y en a 2. Le premier est la contractualisation avec l'État ! Nous sommes parmi les 322 collectivités à contractualiser avec l'État et il faut bien décrypter cette loi car on a l'impression que même la DGCL ne la comprend pas ! Nous voulons bien respecter les 1,2% mais nous avons beaucoup transféré et nous sommes à ce jour plutôt aux alentours de 6% (quid des transferts ?). L'incompréhension était telle qu'on nous demandait de rester dans les 1,2% quoiqu'il arrive alors qu'après une relecture attentive de la circulaire chez la préfète avec le DGFIP les transferts ne sont pas compris.
Le second projet d'actualité est notre Établissement Public d'Aménagement avec lequel nous allons bâtir une ville pour accueillir 50 000 étudiants, créer 3000 emplois privés et construire 3300 logements en 6 ans (6000 sur toute l'agglomération).
Bâtir une ville avec les services publiques nécessaires nécessite une approche pluridisciplinaire avec une approche smartcity autour des villes campus étendu sur 1000 hectares de ZAC sur 4 communes. C'est le côté atypique de mon job de DG d'une agglo en plein développement. C'est pour desservir ces villes campus que nous attendons avec impatience la ligne 18 du Grand Paris Express qui est pour nous fondamentale !
Que vous apporte l'ADGCF ?
Au niveau régional, j'ai accepté de m'occuper de la délégation régionale de l'association car face aux enjeux métropolitains, il fallait créer un réseau d'échange et un cercle de réflexions sur les métiers innovants et sur les thématiques managériales. C'est ce que nous mettons actuellement en place avec mon collègue de première couronne Antoine Valbon du Grand Orly Seine Bièvre en invitant tous nos collègues d'Île-de-France à une première réunion dans les prochaines semaines.
Au niveau national, notre association organise des colloques d'actualité très intéressants, produit des publications de qualité et porte un réseau d'experts important grâce à la structure administrative qui est toujours là pour nous aider. Sans oublier les Universités d'été qui constituent chaque année un temps incontournable pour prendre de la hauteur et échanger avec nos pairs. Le lien très fort qui nous unie à l'AdCF est également très important car il nous permet d'organiser le maillage du territoire avec les élus pour représenter l'intercommunalité dans les régions.
[11/04/2018]