Portrait de Mathieu Chartron, DGS du Centre de Gestion de la Fonction Publique Territoriale de Saône et Loire


Portrait de Mathieu Chartron

Quel a été votre parcours professionnel ?

Mon parcours s'est inscrit dans l'accompagnement de la montée en puissance de l'intercommunalité et a suivi les fortes évolutions qui ont touché l'organisation administrative des territoires depuis quinze ans.

J'ai débuté ma carrière en 2002 en tant que DG de la Communauté de Communes du Jura Dolois. À ce poste, j'ai pu être en prise directe avec l'ensemble des problématiques liées à la création et à la montée en charge d'une intercommunalité récente qui demande la création de nouvelles pratiques. Nous avons beaucoup travaillé, avec les élus, sur le développement économique de l'intercommunalité, sur les domaines de l'urbanisme avec le SCOT, sur la gestion administrative et financière de la collectivité, ainsi que sur son évolution institutionnelle.

Par la suite, cette Communauté de Communes a fusionné pour devenir la Communauté d'Agglomération du Grand Dole qui comptait 42 communes et 54 000 habitants, et dont je suis devenu le DGS. Cette fusion a impliqué une montée en puissance de l'intercommunalité dans le paysage institutionnel local, et bien sûr, des prises de compétences diverses. Mon poste de DGS, en plus de conserver un aspect opérationnel, s'est aussi tourné vers une dimension managériale envers des équipes pluridisciplinaires et les 42 communes composant notre intercommunalité qui avaient une exigence quant au transfert de compétences. J'ai alors pu conduire le projet de mutualisation des services entre les communes et la communauté. Cette période fut un moment d'importante pédagogie et d'anticipation auprès des élus du territoire afin de les préparer à cette réorganisation qui devait assurer un service public plus lisible et de meilleure qualité sur le bassin dolois.

Suite à ce processus de mutualisation, je suis devenu en 2012 DGS des services mutualisés de la Ville de Dole et de la Communauté d'Agglomération du Grand Dole. À ce poste, j'ai été amené à superviser une administration regroupant 650 agents, me permettant d'obtenir une vision globale de l'action publique locale, qui me paraît être l'essence même du métier de cadre dirigeant territorial.

Puis, en 2015, je suis devenu DGS de la ville de Sens et de la Communauté d'Agglomération du Grand Sénonais. Ce nouveau poste représentait un défi dans le cadre d'un territoire fragilisé socialement et politiquement. Une mutualisation effective dès 2016 nous a amenés à une réorganisation des services et à une extension de la Communauté de Communes en Communauté d'Agglomération.

Enfin, depuis octobre 2017, je suis devenu DGS du Centre de Gestion de la Fonction Publique Territoriale de Saône et Loire. Il s'agit d'un poste à connotation plus administrative et basé à l'échelle départementale. Nous sommes avant tout un service de conseils aux collectivités locales qui doit profondément remanier sa stratégie, repenser son rôle en complémentarité des collectivités et développer son expertise dans un cadre contraint et mouvant.

 

Quel projet a particulièrement marqué votre carrière ?

La mutualisation des services entre ville centre et intercommunalité que j'ai connue à deux reprises, à Dole en 2011-2012, et à Sens en 2015, m'a particulièrement marqué. Ce sont des projets fortement intéressants car vous embrassez l'ensemble des politiques publiques. C'est à la fois de la stratégie territoriale et du management d'équipe qui côtoient de nombreuses problématiques.

À Dole, la transformation de la collectivité en Communauté d'Agglomération a entraîné un élargissement des compétences qui supposait des besoins nouveaux en matière de gestion administrative et financière. Il y avait une nécessité de structuration importante afin de pouvoir répondre aux missions de l'intercommunalité. La mutualisation des services a permis de faire émerger une organisation administrative commune à organigramme unique, ce qui impose de profonds changements structurels.

Dans le cas de Sens, le choix de la mutualisation relevait davantage d'une décision politique. Depuis 2014, la ville de Sens et l'agglomération bénéficiaient de la même présidence, ce qui était nouveau pour ce territoire. La mutualisation répondait aussi à une volonté économique afin de faire face aux difficultés financières de la Communauté.

Ces deux expériences de mutualisation étaient pour moi particulièrement intéressantes, car ce processus constitue une véritable politique publique. Il questionne en profondeur l'organisation administrative d'un territoire. Il faut donc permettre aux pouvoirs exécutifs d'appréhender cet outil technique en théorisant les objectifs poursuivis dans le cadre d'un projet de territoire global. Seul cadre mutualisé dès le lancement du projet, les élus m'ont confié la mission de réunir et d'orchestrer un comité technique de suivi de la mutualisation, réunissant les cadres des deux entités. Il a fallu ici faire preuve de pédagogie, de diplomatie et de persuasion pour animer ce comité, en proie à la fois à une certaine appréhension dans le cadre de la refonte totale d'un organigramme, ainsi qu'à une certaine « pression », tous les chefs de service devant produire de nouveaux projets de service et devant animer la fusion de leurs équipes.

Au-delà de ce travail technique extrêmement lourd, j'ai animé un comité de pilotage de validation auprès des élus. Ce travail demandait, là encore, beaucoup de pédagogie et de diplomatie. J'ai ainsi dû mettre en œuvre un système de suivi juridique, financier et institutionnel performant, par le biais de conventions et de tableaux de suivi extrêmement cadrés. Au niveau du personnel et des organisations syndicales, la mutualisation des services est par essence anxiogène et peut également provoquer des systèmes de défiance entre les agents des deux collectivités. Pourtant, l'adhésion du personnel à la démarche est une condition essentielle de réussite. J'ai donc mis en œuvre un travail de concertation et d'information très important, en développant une communication interne inexistante jusqu'alors.

La mutualisation des services a donc été, pour moi, une expérience managériale et opérationnelle sans précédent par son ampleur et ses aspects transversaux. Elle m'a ouvert à une vision totalement globale et transversale de l'action publique locale, me permettant de pouvoir appréhender l'ensemble des politiques publiques du territoire.

 

Quel est votre sujet d'actualité ?

Depuis six mois, j'ai rejoint le centre de gestion de la fonction publique territoriale de Saône et Loire. Notre projet actuel est d'apporter, dans le cadre de ce centre qui est lui aussi un organisme mutualisateur, du conseil et de l'expertise auprès d'intercommunalités qui en ont grand besoin suite aux fusions qu'elles engagent. Nous nous posons en tant qu'outil de conseils, d'expertise et de confiance auprès des intercommunalités du département pour les aider à progresser sereinement.

 

Que vous apporte l'ADGCF ?

Je suis entré à l'ADGCF en 2006. L'association m'apporte une ouverture d'esprit, un réseau d'échange professionnel qui ne verse pas dans le corporatif, et la possibilité de participer au débat. Ce sont aussi des moments de respiration et de convivialité.

[27/03/2019]